Captivité sempiternelle
Faust Kellner ft. Aerith Faalenas
"Ce n’était pas qu’ouvrir les yeux."
Une nuit de Juillet 418...
Mon regard s’arrête vaguement sur les vitres, fixant silencieusement un point dans le vide tandis qu’une faible lumière éclaire la pièce ou plutôt une lueur si on précise le côté lunaire du phénomène…
… Je soupire légèrement en me retournant sur le matelas. Ramenant la tête aux creux de mes bras tout en fermant les paupières. J’ai effectivement du mal à trouver le sommeil ce soir mais je ne m’en formalise pas plus. Ce n’est qu’une question de temps avant que je ne m’endorme. Tout du moins, je le pense. Il n’y a rien d’autre que le silence, un silence presque inconfortable lorsque je perçois quelques légers grésillements. Un insecte quelconque, une brise qui fait légèrement claquer un volet et je me retourne de nouveau en ouvrant les yeux pour faire face au morceau de métal, adossé au mur et pourtant immobile. Cette simple vision, elle me rappelle ces dernières semaines. Des images qui défilent comme les pages d’un album photo se dessinent dans ma tête alors que mes iris descendent un peu plus bas, intensifiant cette réflexion.
Je n’étais pas là quand ça s’est produit. Je n’étais pas présent. Ni pour prendre de ses nouvelles, ni rien d’autre. Pas que je ne le voulais pas, enfin, il me semble. J’ai du mal à me figurer mon état d’esprit. J’étais juste… J’étais absent. Rien de plus.
Qu’est-ce que ça m’apporte d’y penser maintenant ? Je ne le sais pas moi-même. J’essaie seulement de comprendre. Comprendre pourquoi je n’ai pas besoin de le voir malgré cette envie de m’y rendre. Si je me levais, je pourrais y être en moins d’une quinzaine de minutes.
Ha… Débarquer comme ça, sans raison en pleine nuit ? “Logique” bonsoir, ravi de vous rencontrer.
En vérité, je ne sais pas vraiment comment réagir à la situation, mis à part faire une grimace furtive en refermant les yeux quelques secondes, expirant un bon coup au passage avant d’observer Jester depuis ma position. Hm… J’ai encore quelques réglages à faire… Je m’en occuperai plus tard…
Un dernier soupir et je fais la sourde oreille à mes introspections bien que ce soit plus dû à l’épuisement.
Les minutes passent dans un noir mental complet, voir même les heures qui sait ? Mais je me surprend à… ouvrir les yeux ? Un tourbillon incompréhensible, des scènes hasardeuses comme si tout était clair...
non… Ce n’était pas qu’ouvrir les yeux.
- Maman va chasser, que désires-tu, mon petit être adoré ? |
Son visage, sa simple vue me rendait heureux mais il est imperceptible. Caché, comme si quelqu’un s’était amusé à le recouvrir d’encre pour ne laisser qu’une silhouette.
Mais je ne m’en soucie pas, je savais que l’heure du repas approchait et je voulais juste rester à ses côtés. Enfin, surtout, curieux que j’étais, j’avais un désir innocent d’aider celle qui s’occupait de moi. Aussi, lui avais-je vainement demandé de l’accompagner, mais c’était inutile. C’était trop dangereux pour moi, je devais rester “à la maison”. Loin de toute menace potentielle.
Oui, je restais seul dans ces moments-là. Des moments que j’avais du mal à supporter. Sa présence me manquait. Ça avait beau faire quelques dizaines de minutes, voir moins. Je ne savais plus. J’avais juste peur. J’avais besoin d’elle, de sa présence pour me rassurer. Et c’était ce jour-là, la gorge brûlante et les yeux au bord des larmes que j’avais osé faire cette bêtise. Celle de vouloir la rejoindre.
Il aurait pourtant été plus sage de l’attendre, sûrement. Mais je m’étais dit que je la retrouverai facilement. Naïf. Je n’avais fait que me perdre dans les bois, fronçant légèrement les sourcils avec un air inquiet tandis que je m’efforçais de la chercher.
- Ma… man... |
Le temps passait et toujours rien, aucun signe. Juste le silence, un silence effrayant. Tant et si bien que j’avais fini par laisser écouler quelques larmes, reniflant un instant avant d’élever un peu plus la voix en espérant être entendu. Mais… toujours rien alors que les minutes défilaient, je me perdais toujours plus profondément dans ce décor sinistrement verdoyant... jusqu’à ce que la tristesse prenne le dessus, m’effondrant au sol en gémissant bruyamment.
Entendais-je soudainement tandis que j’arrêtais de sangloter, surpris.
Mis à part ma mère, je n’avais jamais vu d’autres personnes, pas vivante en tout cas, ou alors je ne m’en souvenais pas. De ce fait, l’émotion qui prenait le pas sur ma peine, était bien l’angoisse. Je ne reconnaissais pas ce ton rauque. Non… ces tons rauques. Il y en avait plusieurs. Malheureusement… J’étais incapable d’en localiser la provenance à cause de mon environnement. J’avais l’impression d’être entouré de miroir à cause des arbres. Ma tête tournait dans tous les sens à chaques fois qu’une autre voix me parvenait, l’appréhension montant crescendo.
Et puis… Une ombre, puis deux, puis trois. Affalé au sol, je reculais vivement, une expression terrifiée sur le visage. Au loin et à cause de mon mouvement de reculons, j’avais du mal à les voir mais eux, semblaient m’avoir vu. Et bien évidemment, je n’avais d’autres solutions que pleurer de nouveau avant de me stopper au moment où les visages des intrus se dévoilaient progressivement. “J’ai peur”... “Maman”...“J’ai peur”
Je me répétais ces mots intérieurement en regardant successivement ces étrangers qui s’approchaient maintenant calmement. Ils me parlaient, me demandaient mon nom même si je n’entendais rien. Je respirais de manière saccadée tout en reculant de nouveau avant de me faire stopper par un arbre derrière moi. Je ne comprenais pas ce qu’il me voulait, je voulais juste que ma mère revienne. Vain espoir lorsque l’un d’eux avait pris la décision de s’accroupir à ma hauteur pour me porter. Chose qui me fit pleurer de plus belle. Qui étaient-ils ? Où est-ce qu’ils m’emmenaient ? Toutes ces questions s’emballaient dans ma tête alors que celui qui me tenait tentait de me calmer. De longues heures de panique... et la dernière chose que mes yeux avaient vu, était cet espèce de village en sortant du bois lorsque je m’étais finalement endormi.
©️️AxyGry - Ariesten